L’héroïne du roman, Diane, perd brusquement son mari et sa fille dans un accident de voiture. Le décor est très vite posé, les premières pages du roman allant et venant au gré du présent de cette jeune femme en deuil et des souvenirs du jour où tout a basculé.
Un ami très présent voire encombrant tente de l’aider à surmonter cette épreuve. Plusieurs personnes ne la comprennent pas. Elle finit par s’émanciper d’un quotidien devenu une prison, à bien des titres, en séjournant en Irlande.
Découvertes, rencontres la mènent sur un autre chemin.
Agnès Martin-Lugand, s’auto-édite puis sera éditée aux Éditions Michel Lafon, qui ont publié ses autres titres depuis, Entre mes mains le bonheur se faufile en 2014, La vie est facile, ne t’inquiète pas (2015) et Désolée, je suis attendue en 2016. The Weinstein Company a, de plus, acheté les droits de ce roman pour l’adapter au cinéma.
Ce roman peut laisser quelque peu perplexe.
Le sujet central, le deuil, n’est pas une tâche facile. Son ingratitude serait même plutôt de mise. Et, pourtant, l’auteur s’y attèle. Les premières pages, à cet égard, présentent un intérêt quant à la dépression traversée par l’héroïne au début du roman et la manière dont le lecteur peut être appelé à y entrer dans les deux premiers chapitres. Il suffit de suivre le flot des phrases simples.
Un sujet accablant, qui sans être traité à la légère, loin de la, n’est pas amené de façon pesante et oppressante. Pourquoi pas ? On ne saurait dire qu’une seule manière existe de l’écrire et que celle-ci soit meilleure qu’une autre.
La perplexité commence à apparaître dans la suite du roman. L’Irlande, comme échappatoire… Là encore, pourquoi pas ? Pourvu qu’une forme de charme opère, que le lieu soit décrit pour ses spécificités, sa beauté, sa poésie…
Face à l’épreuve endurée par Diane, l’Irlande semble représenter un remède. En définitive, la réponse, même temporaire, résidera davantage dans une rencontre, que dans l’échappée belle ou malheureuse en ces contrées celtes.
Le roman bascule alors très rapidement dans un autre registre.
Certaines critiques ont évoqué « une histoire de résilience ». La résilience n’est-elle pas une mécanique complexe, qui demande du temps et la présence d’un tuteur ? Boris Cyrulnik, qui évoque ce processus dans Un merveilleux malheur, paru en 1999 aux Éditions Odile Jacob, s’y entendrait bien davantage.
Peut-être est-ce par rapport à la manière dont la reconstruction opère que les plus importantes questions émergent. Au-delà de cette question se pose celle de nos intentions de lecture.
Pourquoi lisons-nous ? Parce que cela distrait, parce que c’est intéressant, pour pénétrer l’univers créé de toutes pièces par le romancier ?
Il semble que la critique se soit beaucoup penchée sur le nombre de ventes du livre et sur le fait que, rapidement, ses droits aient été rachetés pour être adaptés au cinéma. Ces éléments sont-ils aujourd’hui gages de qualité ? La priorité est trop souvent apportée à ce qui rapporte, au succès commercial… Indéniablement, Les gens heureux lisent et boivent du café en est un.
À rechercher une lecture-espoir pour échapper au monde réel, qui est déjà si dur et si cruel, le risque n’est-il pas de perdre de vue la complexité d’un vécu riche aussi tragique et difficile soit-il ?
Le roman, n’en demeurant pas moins agréable à lire, a donc posé plus de questions qu’il n’aura apporté de réelles réponses aux lecteurs en recherche d’autre chose qu’une lecture-plaisir.